Stockholm - rive du Lac Maalar et pont Vasterbron ©B. Vauléon, 2009
Les télévisions du monde entier allaient fêter le quarantième anniversaire du premier pas de l'homme sur la lune et la petite phrase de Neil Armstrong tournait en boucle sur les radios.
Emporté par le succès foudroyant de la trilogie "Millénium", j'avais mis mes pas dans ceux de Mikaël Blomkvist et Lisbeth Salander pour découvrir Stockholm.
Juillet était changeant, tantôt venteux, tantôt orageux. À peine descendu de mon taxi et une fois mes bagages déposés dans ma chambre d'hôtel, j'avais décidé de marcher jusqu'aux rives du lac Maalar depuis les hauteurs de Kungsholmen où je résidais. Il me fallait pour cela traverser l'un des nombreux parcs de la ville. C'était dimanche et les stockholmois l'avaient envahi, à leur habitude, tout comme les rives du lac, pour y pratiquer la marche, le jogging, la bicyclette, la pétanque, la lecture ou le farniente, seuls, à deux, en famille ou en tribu.
Pour y manger aussi. On dîne tôt dans ce pays. Le soleil déclinait à peine qu'un peu partout, des mini-barbecues posés à même le sol émettaient des senteurs mélangées et l'on pouvait identifier les communautés immigrées dominantes d'un pays où elles occupent les emplois subalternes que la population cultivée délaisse.
Aux voix entendues, les deux langues les mieux représentées semblaient être l'espagnol (du Chili en particulier) et l'arabe, mais une oreille plus exercée que la mienne aurait sans doute reconnu aussi des accents serbo-croates et farsis, sans compter ceux des allemands et d'autres voisins d'Europe du Nord.
Le pays des Varègues est aujourd'hui pluriethnique, bien plus que la France, l'Allemagne ou l'Italie. Le mythe du suédois uniformément grand et blond est bien écorné et les filles à la peau laiteuse ne courent plus les rues. Par contre, un autre cliché semble avoir conservé toute sa vigueur : elles sont toujours légères et court vêtues.
La minijupe vit ici un second âge d'or, à moins qu'elle n'ait jamais cessé d'avoir le haut du pavé dès que le soleil sourit.
Il faut dire qu'elle est généralement bien portée, l'éducation à la suédoise donnant une silhouette enviable à bien des points de vue. Même si la "malbouffe", ici comme ailleurs, a lancé ses ravages et que l'on croise aussi nombre de personnes en surpoids. Encore merci donc à Mary Quant d'avoir inventé ce vêtement aux aurores des sixties, car je lui dois, en ce mois de juillet 2009, une de mes plus jolies émotions esthétiques.
C'était au deuxième ou troisième jour de ma visite, je ne sais plus. Je revenais du centre et sortais du métro à la station de Thoridsplan. Énorme différence avec la ligne 13 du métro parisien que je fréquente habituellement : ici, ne pas trouver une place assise relève de l'exception.
Nous étions peu nombreux à descendre à cette station périphérique et devant moi marchait une jeune fille blonde, en mini-robe noire et ballerines assorties. Elle montait l'escalier d'un pas allègre, entre la marche et la course, qui faisait balancer son vêtement sur ses jambes nues. J'étais encore au bas des marches qu'elle atteignait le niveau de la rue. C'est alors qu'un souffle de vent venu du souterrain souleva son court vêtement, découvrant deux hémisphères rebondis, dont rien n'entravait le libre mouvement. Rien, je vous dis.
Contraste du blanc et du noir. Vision enchanteresse, plaisir des sens.
Hélas, ce sourire d'Éole ne dura qu'un instant, comme un éblouissement. Ma Perrette avait tourné le coin de la rue et... j'étais accompagné. Mon reflex inutile autour du cou, j'ai amèrement regretté de n'être pas un Doisneau, un Ronis ou un Cartier-Bresson pour avoir su immortaliser cet instant d'exception.
Mais, par un tour malicieux de mon inconscient, je garde en mémoire le nom de Thorildsplan, et de la "Venise du Nord" le souvenir d'une Aphrodite callipyge, déesse au pas léger, au corps libre et au cœur à prendre, qui sait ?
©Pierre-Alain GASSE, août 2009.
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